Selon l’Association des tour-opérateurs de Russie (ATOR), le trafic touristique intérieur a augmenté de 10 % en 2022. Bien que ce chiffre soit inférieur aux prévisions des experts, les acteurs du marché sont convaincus que les vacances dans les régions reculées de la Russie continueront à gagner en popularité. Forbes Life nous explique pourquoi les Russes préfèrent le Kamtchatka, l’Altaï et le Taïmyr aux voyages à l’étranger, quelles sont les nouvelles tendances en matière de voyage et pourquoi les prix des vacances en Russie en font le nouveau luxe.
Changement de cap
Au cours des dernières années, le tourisme intérieur en Russie a subi un certain nombre de chocs. Tout d’abord, une pandémie a changé la façon dont les Russes envisagent les vacances et les voyages. Ensuite, les gens ont commencé à choisir plus souvent des vacances dans leur pays d’origine, notamment en raison des nombreuses restrictions covides qui continuaient à s’appliquer dans de nombreux États.
Après le début de l’opération militaire spéciale*, due à la fermeture des liaisons aériennes avec de nombreux pays étrangers, à l’instabilité du marché des devises et au retrait des systèmes Visa et Mastercard de Russie, de plus en plus de Russes ont choisi de voyager à l’intérieur de leur propre pays. Selon la directrice de Rostourism, Zarina Doguzova, au cours de l’été 2022, le nombre de personnes ayant passé des vacances en Russie a dépassé non seulement les chiffres de l’année dernière, mais aussi ceux de la période prépandémique.
Lors de la planification d’un voyage, les gens ont commencé à accorder plus d’attention à des destinations telles que le Kamtchatka, l’Altaï, le Taymyr, le Mineralnye Vody, le Baïkal, la Carélie et Kaliningrad. Cela s’explique, d’une part, par la fermeture de nombreux aéroports dans le sud du pays et, d’autre part, par le fait que les Russes veulent avoir de nouvelles impressions. Les autorités du Kamchatka estiment qu’en 2022, le nombre de vacanciers dans cette région augmentera de 25 % par rapport aux chiffres antérieurs à la pandémie. Les autorités de Kislovodsk, une station balnéaire située dans les eaux minérales du Caucase, ont également fait état d’une augmentation du nombre de touristes l’année dernière.
« L’année dernière, les stations balnéaires du territoire de Krasnodar ont été les plus populaires. Kazan, la Carélie, l’Altaï, la Bouriatie, le Kamtchatka, le Daghestan et la République tchétchène figurent également parmi les destinations les plus prisées », indique le service de presse de l’agence de voyage Fun & Sun.
« Moscou, Saint-Pétersbourg et Kazan restent en tête du classement des voyageurs russes, selon les statistiques de l’agence de voyage Russpass et le président du Comité du tourisme de la ville de Moscou, Evgeny Kozlov. – Dans le même temps, nous constatons que les touristes s’intéressent aux régions éloignées, par exemple le Kamchatka. Le cas de la région de Tioumen est intéressant : de nombreux touristes ont redécouvert les vacances thermales dans cette région où se trouvent des sources thermales.
La croissance de la demande de voyages en Russie a également été influencée par l’amélioration des infrastructures dans les régions. Bien que certaines destinations, comme la péninsule de Taïmyr dans le territoire de Krasnoïarsk, aient encore besoin de financement et de développement touristique, des changements positifs sont en cours. Par exemple, le territoire de l’Altaï recevra plus de 446 millions de roubles du budget fédéral en 2023, spécifiquement pour le développement de pôles touristiques et la création d’infrastructures d’ingénierie et de transport.
« Ces dernières années, la demande de vacances au Kamchatka n’a cessé d’augmenter : les destinations étrangères sont de moins en moins nombreuses et il y a de moins en moins d’endroits où les Russes ne sont pas encore allés dans leur propre pays, si bien qu’ils veulent voir quelque chose qu’ils n’ont jamais vu auparavant. C’est pourquoi le Kamchatka est devenu une région très populaire pour les investissements dans le tourisme. Alors qu’en 2017, en tant qu’opérateur de projets touristiques du fonds d’investissement Ream Management, nous avons été les premiers à entreprendre la reconstruction et le développement ultérieur du territoire dans cette région, d’autres grands investisseurs et acteurs du marché ont récemment commencé à entrer au Kamchatka. En conséquence, la région est devenue plus confortable pour les vacanciers, et de plus en plus d’hôtels modernes apparaissent ici », explique Lubov Brodach, directeur des opérations du groupe Fantalis, qui gère l’hôtel Laguna Spa au Kamchatka.
Nouveau luxe
Les vacances dans les régions reculées et autrefois peu populaires de la Russie ne sont pas synonymes d’un faible niveau de service et ne sont souvent pas une option économique. « L’activité évolue et prend en compte les besoins des clients. Avec l’arrivée de sociétés de gestion moscovites et fédérales au Kamchatka, nous pouvons parler d’un niveau de service élevé et du respect des normes de service », déclare M. Brodach.
Selon ATOR, les prix des excursions au Kamchatka ont augmenté de 10 à 15 % par rapport à l’été 2022. Cela s’applique au coût de l’hébergement et du programme d’excursions, ainsi qu’aux billets d’avion. Cependant, selon les prévisions des experts, cela n’entraîne pas une baisse de la demande de vacances dans cette région.
« Je pense que tous les hôtels seront occupés et que les billets d’avion seront rares. Ce sera cher, mais nous verrons la jeunesse moderne, les personnes les plus riches de notre pays et des touristes d’autres pays. Si vous souhaitez vous rendre au Kamchatka en été, vous devez donc y penser dès maintenant, car il sera extrêmement difficile de partir spontanément », prédit Lyubov Brodach.
Une situation similaire s’est développée dans d’autres destinations de plus en plus populaires pour les voyages en Russie. Par exemple, le coût de l’hébergement des touristes dans la République de l’Altaï a augmenté de 30 % par rapport à 2021. Selon la vice-ministre des ressources naturelles de la République de l’Altaï, Elena Yalbacheva, le flux de touristes dans les hôtels de cette région dépassera 2,5 millions de personnes en 2022.